Lévrier Greyhound - Les courses en Inde...


Les foulées du Pendjab

Pendant tout l’hiver, les courses de lévriers animent le Pendjab, en Inde. Ces chiens, achetés à prix d’or et entraînés assidûment, courent pour le prix mais aussi pour le prestige du propriétaire, raconte Outlook.

Une course de lévriers à Hoshiarpur, Pendjab.
Cet hiver, le calendrier des courses de lévriers dans la campagne pendjabie est chargé. Ce sport ne cesse de gagner en popularité depuis une quinzaine d’années. Une popularité qui s’explique aussi par l’interdiction de la chasse : les fusils des shikari – les chasseurs – étant réduits au silence, il faut bien occuper les chiens, élevés avec tant de passion. Quelque 500 courses de lévriers ont lieu chaque année au Pendjab, et l’engouement va grandissant à chaque nouvelle saison. Le montant du prix dévolu au vainqueur – de 200 à 1 600 euros, selon l’importance de la course – continue d’augmenter. L’événement se déroule dans une ambiance de carnaval, chacun dans le village apportant sa contribution sous forme d’argent pour le prix mais aussi de pakoda [beignets de pomme de terre], de chai [thé épicé] et de repas copieux. Mais c’est une fête réservée aux hommes – même si, sur la piste, des chiennes peuvent courir aussi.

Paramjit Singh Hundal est le type même du Pendjabi résidant à l’étranger. Pour rien au monde ce propriétaire d’une florissante entreprise textile en Allemagne ne manquerait un séjour dans son village natal de Kotli Raiyyan, dans le district de Hoshiarpur, durant les mois d’hiver. Outre la bonne chère et l’atmosphère bon enfant, ce qui attire Hundal, c’est surtout la course de lévriers qu’il organise ici annuellement en mémoire de son père. “En 1947, quand nous avons fui le Pakistan pour nous installer en Inde, nous avons laissé derrière nous tous nos biens à l’exception de nos chiens. Mon père leur était si attaché qu’il ne pouvait s’en séparer. Aussi, à sa mort, ai-je décidé de mettre sur pied cette compétition, en hommage à sa passion”, nous confie-t-il entre deux courses. A la fin de la compétition, Hundal est d’excellente humeur : son champion, Atom, une bête puissante tout en muscles, importée d’Allemagne pour 2 000 euros, a remporté la course !

D’autres propriétaires de chiens sont plus motivés par l’argent. Deepinder Singh Rikhi, originaire de Jalandhar, est chauffeur routier aux Etats-Unis. “Chaque année, je fais venir des Etats-Unis quatre ou cinq champions pour les revendre ici”, indique-t-il. Un lévrier doté d’un bon pedigree se vend entre 300 000 et 400 000 roupies (de 5 000 à 6 500 euros). Et, dès sa première victoire, ses chiots sont très recherchés. Pour Deepinder et nombre d’exilés comme lui, l’importation des chiens finance leurs vacances d’hiver au Pendjab. Comme ces hommes d’affaires participent également avec ferveur aux compétitions, on compte de nombreux Indiens de l’étranger dans ce négoce. “Chaque année, une cinquantaine de chiens sont importés au Pendjab de pays comme le Royaume-Uni, les Etats-Unis, le Canada et l’Allemagne”, rapporte Sukhbir Singh, un passionné. Leurs propriétaires les choient comme s’ils étaient leurs propres enfants, leur offrant un régime hyperprotéique quotidien qui comprend généralement 1 kilo de viande, 200 grammes de nourriture pour chiens de qualité supérieure, une livre de lait caillé et quatre œufs.

En compétition, les lévriers courent après un leurre attaché au bout d’un câble, sur la piste longue de 100 mètres. Ils poursuivent leur proie, grinçant des dents et tirant sur la laisse. Alors qu’ils galopent, le câble s’enroule autour d’un treuil, amenant rapidement le leurre jusqu’à la ligne d’arrivée, avec les concurrents à ses trousses. On frôle souvent le drame, les deux coureurs (ils ne sont que deux à concourir à la fois) se jetant à la gorge l’un de l’autre, tant est grande leur déception de ne pas avoir attrapé leur gibier. L’année dernière, l’un des chiens de Hundal est mort d’épuisement à l’entraînement, à cause d’un lièvre particulièrement rapide.

Que font les animaux le reste de l’année, une fois la saison des courses terminées ? Ils s’entraînent, tout simplement, à courir toujours plus vite. L’entraînement a généralement lieu après la récolte, quand les rizières sont en jachère, ou sur un terrain découvert. “On les fait courir après des lièvres vivants dans la campagne”, explique Sukhdeep Singh Bajwa, un paysan qui a été garde forestier à Gurdaspur. “A la fin de chaque séance, les chiens et les entraîneurs se partagent le malheureux lièvre.”

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